ж³ - Poems

--o ooo
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Landschaft, Paris mai 2005

Me voilà de retour de ces quelques jours passés en Nord Franche-Comté... avec la pluie et le froid bien sûr mais le soleil aussi... avec tellement de monde autour des tables qu'il manque toujours de la place ou qu'on n'a jamais bien compté les assiettes. Les vaisselles interminables et les promenades qu'il faut souvent écourter parce que d'autres nous attendent pour manger ou bien parce qu'il est temps d'aller à la plage si on veut pouvoir profiter du soleil. Le tour des sablières s'il pleut, bronzette et jeux d'eau et de sable s'il fait beau.

Le champ a été récolté. Ça sent le colza. On respire. Les papillons blancs ont presque tous disparu. Ils virevoltent encore par hasard, souvent en couple, toujours joyeux. Je pense à toi. Les fleurs des champs de la mi-été sont plus grandes et plus sauvages. La sauge est magnifique cette année. Le long du petit canal une libellulle semble nous suivre ou nous montrer le chemin. Son corps bleu métallisé est parfaitement cylindrique, ses ailes transparentes sont ornées à l'extrémité de deux splendides gouttes parfaitement symétriques et d'un noir profond. Elle nous guide jusque vers une ecluse où deux bateaux blancs attendent de pouvoir passer. Quelques hérons cendrés, des canards. Les lilas aussi sont ravissants.

Une promenade à travers champs, au clair de lune. Les moutons sont rentrés. Les chaumières dorment déjà. Il fait frais et ça sent le feu de bois. Ça sent presque la neige en cette belle soirée d'été et ça revigore les corps. Derrière les champs, une clairière et quelques vieux arbres isolés. On s'amuse, comme autrefois, à glisser sur les boules de foin qui tentent de sécher. La paille chauffée par le soleil parfume la nuit. Je pense à toi. On devine les étoiles auprès de cette belle lune qui dessine nos ombres. Côte à côte ou en file indienne, selon la difficulté du terrain, la conversation file. Quelques prunes, quelques mûres, il faut déjà rentrer.

Paris reprend vie peu à peu. Je protège mon accent franc-comtois, je me rappelle les mots rigolos de ma nièce en anglais. Les bisous, les sourires, les séances de jonglage, de pirouettes et d'acrobaties, les kouglehopf et châteaux de sable, les parties d'escoba avec Lili. On a bien ri. J'ai beaucoup pensé à toi. Peut-être parce que tu es une des rares personnes avec qui j'ai passé du temps (et du bon) ces derniers temps. Parce que je me suis sentie bien, c'est tout. Sans réfléchir.

Sans réfléchir : ligne quatre orléans, droite gauche droite gauche. Le sac ne pèse rien, le petit bonhomme ne veut pas s'asseoir, il veut faire comme les grands. Gare Montparnasse enfin, de l'air ! Klaxonnes et odeur de pots d'échappement, c'est rude. Place Catalogne, la Tour Eiffel majestueuse malgré le bruit et le tumulte. Traverser avec attention, les rails enfin.  C'est chez moi. Il fait chaud mais je n'irai sans doute pas à la piscine. Scyphozoé m'attend. Je veux m'assurer qu'elle démarre bien. Peut-être m'apportera-t-elle quelqu'une de tes nouvelles, sous une forme ou bien une autre. Tu étais fatigué ces derniers temps, toujours généreux, moi pas trop.

Occupée à mille choses, le soir c'est ton corps qui me berce, je caresse ta peau et te mordille l'oreille, ta voix s'éloigne et tes mots s'estompent, envie de te dire mille et une choses. Pas le temps. Pas sûre que tu aies envie de les entendre. Pas sûre que ce soit utile. Et dans quelle langue ? Non lo so. Das weiss ich nicht. Je cherche moi aussi le frère que je n'ai jamais eu.

Pas de nouvelles. Bonne nouvelle !? Les petits papillons blancs ont dansé dans mon ventre... j'ai pensé fort à toi. Pas de nouvelles. Peu importe. Notre rencontre est gravée comme un soleil. Je me perds sur des sites Internet qui me parlent d'univers de Gödel, de chromodynamique quantique et de bruits en 1/f... Les pixels rouges, verts, bleus de l'écran m'emmènent vers toi. Je n'oserai pas t'écrire. J'irai sagement me coucher et pour trouver le sommeil, je t'imaginerai là, tout près. Je pourrai caresser ton corps et ton crâne, jusqu'à entendre un de tes soupirs. Je longerai ton corps en en goûtant toute la saveur, deviner que tes muscles peu à peu s'électrifient et que ton corps s'emballe, que ton esprit se perd... Tu peux laisser aller ton corps à mes caresses et t'endormir sans craintes, je veillerai sur toi. Ebouriffée, frissonnante, je me réveille et j'ai dans la main une pièce du trésor.

Comment vas-tu tesoro ?
Baci.


--o Suzon Läßer -x- 2005